Avant-propos : il se peut que, parfois, le mail annonçant un nouvel article de ce blog se retrouve dans les SPAMS ou dans les INDÉSIRABLES de votre messagerie. Merci de vérifier et bonne lecture.
A cette époque, il n’y avait pas de réseaux sociaux et de redoutables fake news. Et pourtant…
Dans le journal « Le Progrès du Finistère » du 13 avril 1918, on peut lire :
Oui, ma chère, j'ai vu la police en arrêter un auprès de la gare.
- Et mol j'en ai vu trois entre deux gendarmes.
- Qui ? Des piqueurs ?
- Oui, des gens qui piquent les enfants, les jeunes filles, pour leur inoculer le choléra, la peste, la tuberculose, la rage, la maladie du sommeil.
Et les langues marchent. Voilà, pour l'instant, le thème des conversations quimpéroises, aux Halles, chez la bouchère, chez la boulangère, un peu partout et, dorénavant, nous n'avons plus rien à envier à Nantes, à Saint-Nazaire, à Lorient, à Vannes, etc.
Quimper a donc ses piqueurs. Si habiles, qu'on ne sent pas leurs piqures. Ce n'est que par hasard qu'on voit perler soudainement, a la joue ou sur la main, des gouttelettes de sang vermeil.
Et tout Quimper s’affole. Les mamans et les bonnes d'enfants désertent le Parc, les allées de Locmaria et les autres buts de promenade.
Selon d’autres sources (rapport journalier du commissaire de police, lettres de lecteurs, etc…)
Le 9 avril 1918, vers une heure de l’après-midi, en bas du mont Frugy, l’agent de police Gaonac’h intervient pour protéger du public une religieuse que l’on accuse d’être un homme déguisé en femme et d’avoir déjà piqué plusieurs enfants.
Mont Frugy. En contrebas, plateau de la Déesse devant la place du Champ de bataille
C’est un espion, un piqueur, crient les exaltés.
Cette religieuse est la directrice de l’école de Poullan, inoffensive sœur de la congrégation du Saint-Esprit, qui a commis l’imprudence de se retirer sur un banc du plateau de la Déesse (en bas du mont Frugy) pour y prendre son repas. Elle s’est vue aussitôt signalée comme espion par une méchante tireuse de cartes qui, d’une maison voisine, l’a aperçue et a cru ainsi faire preuve d’extra lucidité !
Les sœurs du Saint-Esprit , appelées aussi les sœurs blanches
Tableau de Lucien Simon (1861 1945)
Afin de la soustraire aux coups, l’agent accompagne la religieuse jusqu’au bureau de police.
Extrait du courrier d’un lecteur quimpérois : Conclusion, sur le plateau de la Déesse -aussi appelé plateau de Bacchus- où nos ivrognes peuvent journellement, en toute sécurité, cuver leur alcool, je demande que l’on place une pancarte avertissant les honnêtes gens qu’il est dangereux de s’y reposer.
Le lecteur conclut :
Je me refuse à croire aux hommes piqueurs. Mais après ce qui vient de se passer, force m’est d’ admettre qu’il existe des esprits fortement…piqués.
Il y a des gens dont l’intérêt est d’énerver le public et de lui faire oublier la ruée boche.
Pierrick
Les hommes piqueurs... la rumeur d'Orléans qui mettait en garde les jeunes filles contre les cabines d'essayage des magasins de vêtements... Quelle sera la prochaine légende urbaine?
La peur contagieuse des "Piqueurs" !! Nous avons récemment connu le même phénomène quasi hystérique (en boîtes de nuit, rappelez-vous !)